Quel est l’ultime plan d’Israël pour l’après-guerre à Gaza ?

Dans sa vision de l'après-guerre à Gaza, le ministre de la défense, M. Gallant, a déclaré qu'une entité palestinienne non définie prendrait les choses en main.

Israël se réserverait le droit d’opérer à l’intérieur du territoire de Gaza, ce qui signifie que ses forces pourraient aller et venir à leur guise, à l’instar de l’actuelle Cisjordanie occupée.

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Jeudi, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a fait part de son “plan du jour d’après” pour la bande de Gaza, une fois qu’Israël aura achevé son opération militaire contre le Hamas, qui dirige le territoire depuis 2007.

Ce plan fait partie d’un document intitulé “Vision pour la troisième phase”, soumis lundi au cabinet de guerre du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Il indique que l’administration civile de l’enclave serait confiée à des “acteurs palestiniens”anonymes, tandis qu’Israël conserverait la possibilité de mener des activités militaires dans la bande de Gaza à l’issue de la guerre.

Voici ce qu’il faut savoir sur ce plan.

Qu’est-ce que le plan du “jour d’après” ?

Selon ce nouveau plan, ni le Hamas ni Israël ne gouverneront la bande de Gaza une fois que les hostilités y auront pris fin, mais cela s’accompagne de certaines réserves, a révélé M. Gallant.

Le plan stipule que la guerre d’Israël dans le territoire se poursuivra jusqu’au retour des otages pris par le Hamas dans le sud d’Israël le 7 octobre, au démantèlement des “capacités militaires et de gouvernement” du Hamas et l’élimination de toute menace militaire résiduelle, a rapporté l’Agence France-Presse (AFP).

Une fois tout cela réalisé, une nouvelle phase commencera au cours de laquelle “le Hamas ne contrôlera pas Gaza et ne constituera pas de menace pour la sécurité des citoyens d’Israël”, d’autres organes palestiniens assumant la gouvernance du territoire.

Israël se réserverait le droit d’opérer à l’intérieur du territoire, ce qui signifie que ses forces pourraient aller et venir à leur guise, à l’instar de ce qui se passe actuellement en Cisjordanie occupée. Toutefois, Israël ne maintiendra pas de présence civile constante dans l’enclave une fois les objectifs de guerre atteints, et il n’y aura pas non plus de colonies israéliennes.

M. Gallant a également déclaré qu’Israël poursuivrait sa surveillance intensive de la frontière de Gaza. Cela pourrait impliquer le maintien d’un blocus terrestre, aérien et maritime sur la bande de Gaza, ainsi que l’inspection de tout ce qui entre et sort de Gaza après la guerre, a rapporté le correspondant d’Al Jazeera, Hamdah Salhut.

M. Gallant n’a pas précisé quels fonctionnaires palestiniens gouverneraient la bande de Gaza, se contentant de déclarer que

“Les résidents de Gaza étant palestiniens, des organes palestiniens seront en charge, à condition qu’il n’y ait pas d’actions hostiles ou de menaces à l’encontre de l’État d’Israël.

“L’entité qui contrôlera le territoire s’appuiera sur les capacités du mécanisme administratif existant (comités civils) à Gaza”, précise le plan de M. Gallant.

Il a également abordé les plans de reconstruction de Gaza après la guerre, déclarant qu’une coalition d’acteurs internationaux, comprenant des États arabes et européens et d’autres alliés occidentaux, serait chargée de cette tâche.

Des soldats israéliens gardent la frontière sud avec Gaza le 29 décembre 2023. Dans le cadre du plan du “jour d’après” de M. Gallant, les nations arabes et européennes – ainsi que d’autres « alliés » occidentaux – devraient superviser la reconstruction de Gaza [Amir Levy/Getty Images].

En quoi ce plan est-il comparable aux propos de M. Netanyahou ?

M. Netanyahou a également déclaré qu’un “gouvernement civil” devrait diriger la bande de Gaza une fois la guerre terminée, mais il est opposé à l’idée que l’Autorité palestinienne, le gouvernement dirigé par le Fatah qui contrôle en partie la Cisjordanie, soit placée à la tête de la bande de Gaza.

Il a également déclaré que l’armée israélienne devait d’abord “éliminer le Hamas”avant que les plans d’après-guerre puissent entrer en vigueur.

En novembre, M. Netanyahu a déclaré qu’Israël prendrait la responsabilité de la sécurité de Gaza pour une “période indéfinie”, sans en préciser les modalités. Il a ajouté que cela serait nécessaire pour empêcher une nouvelle “éruption” de “terreur du Hamas”.

Qu’en disent d’autres Israéliens haut placés ?

Lundi, le ministre de la sécurité nationale d’extrême droite, Itamar Ben-Gvir, a appelé au retour des colons israéliens dans le territoire après la guerre et à une “solution pour encourager l’émigration” de la population palestinienne de Gaza, faisant écho à des commentaires similaires du ministre des finances d’extrême droite, Bezalel Smotrich.

Dans une interview accordée dimanche à la radio de l’armée israélienne, M. Smotrich a déclaré que l’expulsion d’environ 90 % de la population de Gaza de l’enclave contribuerait à la sécurité dans la région après la guerre, car Gaza est un

“foyer où deux millions de personnes grandissent dans la haine et aspirent à détruire l’État d’Israël.

“Si seuls 100 000 ou 200 000 Arabes à Gaza et non deux millions, le discours sur le jour d’après sera tout autre”, a-t-il ajouté.

Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, s’exprime lors d’une conférence de presse conjointe avec le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, à Tel Aviv, le 18 décembre 2023 [Violeta Santos Moura/Reuters].

Qu’en dit l’Autorité Palestinienne ?

Dans une interview accordée au Financial Times, le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammad Shtayyeh, a déclaré que tout accord éventuel devait comporter “une solution politique pour l’ensemble de la Palestine”, et pas seulement pour Gaza.

“Israël veut séparer politiquement Gaza de la Cisjordanie”, a déclaré M. Shtayyeh.

“Je ne pense pas qu’Israël quittera Gaza de sitôt. Israël va créer sa propre administration civile qui fonctionnera sous l’égide de l’armée d’occupation israélienne. La question du “jour d’après” n’est donc pas vraiment claire.”

Qu’en pensent les États-Unis ?

Washington milite en faveur d’une solution à deux États et a suggéré que Gaza soit gouvernée par une Autorité palestinienne “revitalisée”, basée en Cisjordanie occupée.

Le plan de M. Gallant est “totalement contraire à ce que les Américains envisagent dans leur concept dit du ‘jour d’après’”, a déclaré Mike Hanna, correspondant d’Al Jazeera.

“Les Américains fondent leurs propos sur l’idée que l’Autorité palestinienne prendrait le contrôle ou l’administration de Gaza”, a-t-il ajouté.

Jeudi, le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est envolé pour une visite en Israël où les discussions sur l’avenir de Gaza après la guerre devraient être à l’ordre du jour.

 

Article original en anglais : What is Israel’s latest ‘day after’ plan for Gaza?, Al Jazeera, le 5 janvier 2024

Traduction : Spirit of Free Speech



Articles Par : Al-Jazeera

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