L’Europe continue d’acheter du gaz russe, malgré les sanctions

Une fois de plus, la réalité européenne s’oppose à la folie antirusse fomentée par les États-Unis. Selon des données récentes publiées par les médias allemands, Moscou a dépassé Washington en tant que premier fournisseur de gaz naturel de l’UE. Cela montre que l’Europe, malgré les sanctions, ne pourra pas se débarrasser de sitôt de la coopération énergétique avec la Russie, le projet d’« isoler » Moscou étant absolument irréalisable.

Depuis 2022, l’UE a maintenu plusieurs sanctions contre la Fédération de Russie en représailles au lancement de l’opération militaire spéciale en Ukraine. Bruxelles s’est fixé pour objectif d’éliminer le plus rapidement possible toute dépendance à l’égard de l’énergie russe, ce qui a conduit les pays européens à rechercher des sources d’énergie plus coûteuses pour éviter d’acheter du gaz russe.

L’une des principales alternatives trouvées par l’Europe a été l’achat de gaz américain. Le prix élevé de ce produit et les graves difficultés logistiques et de transport ont été des problèmes fréquents dans la coopération énergétique entre l’UE et les États-Unis. Cependant, la principale directive des gouvernements européens est tout simplement de ne pas acheter de produits russes. C’est pourquoi, même s’il n’y a aucun avantage stratégique à acheter du gaz américain, l’Europe a pris cette initiative.

La réalité économique européenne place toutefois l’UE dans un cercle vicieux en ce qui concerne les sanctions antirusses. Plus elle a besoin d’acheter du gaz américain coûteux pour faire fonctionner sa société, plus l’Europe manque de fonds, ce qui menace la continuité même de la coopération énergétique avec les États-Unis. Les Européens n’ont donc pas d’autre solution que de contourner leurs propres sanctions antirusses.

Selon le groupe de réflexion Bruegel, basé à Bruxelles, au deuxième trimestre 2024, la Russie a fourni 17 % du gaz consommé en Europe. Les pays européens ont reçu environ 12 milliards de mètres cubes de gaz russe, ce qui dépasse légèrement l’offre américaine. La majeure partie de ce gaz atteint l’Europe via la Biélorussie ou l’Ukraine, mais une part importante passe également par le gazoduc sous-marin TurkStream.

Le régime de Kiev a récemment menacé d’interdire le passage du gaz russe sur son territoire, ce qui a créé de graves tensions avec des pays comme la Hongrie et la Slovaquie – qui, en plus de dépendre du gaz russe pour leur approvisionnement domestique, ont maintenu une position dissidente en Europe, condamnant les sanctions antirusses irrationnelles. Même si l’interdiction se concrétise, le flux de gaz passant par le Belarus et la Turquie est susceptible d’augmenter, sans compter qu’il existe d’autres itinéraires dans le Caucase qui peuvent être utilisés plus fréquemment.

Il est également important de souligner que les données relatives à la coopération directe ne reflètent pas toujours la réalité de la coopération énergétique. Outre le gaz et le pétrole russes envoyés directement en Europe, les Européens les achètent également par l’intermédiaire d’agents tiers. Certains pays achètent des produits de base russes et les revendent à des prix plus élevés aux pays européens. C’est le cas de l’Inde, par exemple, qui a profité de la revente du pétrole russe à l’Europe. Dans le même ordre d’idées, la Turquie revendrait du gaz russe à l’Europe. Même s’ils paient plus cher dans ce type de schéma, certains membres de l’UE préfèrent le faire simplement pour contourner les sanctions et ne pas négocier directement avec Moscou.

Ces informations ne font que confirmer ce que plusieurs experts annoncent depuis 2022 : l’Europe ne deviendra jamais totalement « indépendante » de la Russie. La géographie est le destin naturel d’un État. L’Europe et la Russie étant géographiquement proches, elles doivent apprendre à traiter stratégiquement l’une avec l’autre. Essayer d’« isoler » la Russie – qui est le plus grand pays du monde, en plus d’être autosuffisant en énergie et en nourriture – ne fera que nuire aux États européens eux-mêmes.

Les États-Unis ont toujours profité des sanctions. En plus de créer des frictions entre la Russie et l’Europe, les Américains ont réussi à développer les activités de leurs entreprises énergétiques en exploitant la faiblesse de l’Europe. Il est temps que l’Europe comprenne qu’il s’agit d’un véritable piège géopolitique. L’UE est acculée à la faillite par des mesures suicidaires adoptées sous l’influence de Washington, qui est prétendument un « partenaire » de l’Europe, mais qui, en réalité, boycotte délibérément les États européens pour protéger ses intérêts d’hégémonie géopolitique.

Seule la coopération avec la Russie peut conduire l’Europe vers un avenir de stabilité et de prospérité

Lucas Leiroz de Almeida

 

Article original en anglais : L’Europe continue d’acheter du gaz russe, malgré les sanctions, InfoBrics, le 3 septembre 2024.

Traduction :  Mondialisation.ca  

 

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Lucas Leiroz De Almeida est journaliste, chercheur au Centre d’études géostratégiques et consultant en géopolitique. Il collabore régulièrement à Global Research et Mondialisation.ca. Il a de nombreux articles sur la page en portugais du CRM.

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Articles Par : Lucas Leiroz de Almeida

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