Gazoduc Nigéria-Maroc : un projet qui n’est pas dans notre intérêt

Image d’illustration : SASOL Gas Pipeline – Temane – Mozambique (CC – Wikimedia)

Annoncé en décembre 2016, le projet de Gazoduc Offshore Nigeria Maroc vise la construction d’un gigantesque pipeline long de près de 5000 km depuis le Nigeria jusqu’au Maroc, pour un coût aujourd’hui estimé de 20 milliards de dollars US (mais nous savons que les coûts réels sont la plupart du temps bien plus élevés). Il serait construit dans le prolongement du gazoduc ouest-africain (GOA), long de 678 km et en service depuis 2010. Il ambitionne de desservir 12 pays sur le continent africain et quelques 300 millions de consommateurs potentiels, avec une éventuelle extension vers l’Europe.

Nous organisations soussignées, sommes convaincues que ce projet sera néfaste pour notre région.

En effet,

  1. Alors que l’accélération du réchauffement climatique dépasse toutes les prévisions et que les émissions de gaz à effet de serre ont marqué un nouveau record en 2016, la construction de ce gazoduc ne peut aller que dans le sens d’une augmentation de l’extraction et de la consommation des ressources fossiles, principales responsables du réchauffement de la planète.
  2. Contrairement à ce qui est souvent affirmé, le gaz n’est pas une énergie propre. Le méthane qu’il contient est beaucoup plus volatile que le CO2 et considérablement plus puissant en potentiel de réchauffement global [1]. Or la concentration de méthane dans l’atmosphère s’est accélérée dangereusement depuis 2007.
  3. L’extraction, le transport et l’utilisation du gaz fossile a des répercussions environnementales considérables. Aux émissions de méthane, il convient de rajouter les effets perturbateurs des études sismiques sur la faune marine, l’utilisation et le rejet de diverses substances chimiques et déchets, les risques de fuites, incendies et explosions liés à la corrosion et à la navigation.
  4. Le tronçon déjà construit (GAO) s’est fait sans consultation des populations qui ont récusé l’étude d’impact environnemental.
  5. C’est un projet pensé loin des populations. Elles ne sont pas consultées et ne seront pas les premières bénéficiaires de ce gazoduc. Alors que le Nigeria est le premier exportateur africain de gaz et de pétrole, moins de la moitié de la population a accès à l’électricité. Au Bénin, au Togo, déjà desservis par le GOA, à peine un tiers de la population a accès à l’électricité.
  6. C’est un projet au service des multinationales. L’exploitation des hydrocarbures au Nigeria n’a pas enrichi les Nigérians. Alors que le Nigeria est classé 20° dans le classement mondial par rapport à son PIB, plus de 60% de la population vit sous le seuil de pauvreté et l’espérance de vie ne dépasse pas les 53 ans. En revanche, les investisseurs étrangers ont rapatriés plus de 12, 7 milliards US$ pour la seule année 2015.
  7. L’énergie produite servira essentiellement à alimenter des projets d’agrobusiness et de pôles industriels orientés vers l’exportation. Au détriment des petits agriculteurs et artisans et de la satisfaction des besoins des populations.
  8. Ce projet sera un gouffre financier. Il est vraisemblable que les 20 milliards $US prévus soient multipliés au moins par 2, ce qui entraînera une augmentation exponentielle du volume de la dettede nos pays.

Nous sommes convaincus que le projet de gazoduc Nigeria-Maroc est néfaste pour la région, pour ses habitants et pour la planète.
Parce que nous choisissons le climat face à l’énergie fossile,
Parce que nous choisissons la santé de notre planète face aux appétits des multinationales,
Parce que nous refusons de payer pour des projets qui ne nous apporterons rien,
Nous disons non au Gazoduc Nigeria-Maroc
.

Organisations signataires :
1. ATTAC Maroc
2. Health of Mother Earth Foundation (HOMEF), Nigeria
3. Peoples Advancement Centre, Nigeria
4. Justica Ambiental, Mozambique
5. Centre for Children’s Health Education, Orientation and Protection (CEE-HOPE), Nigeria.
6. Centre for Environment, Human Rights and Development (CEHRD), Nigeria.
7. Les Amis de la Terre Togo (ADT-Togo), Togo
8. Jeune Chretien en Action Pour le Development (JCAD), Togo
9. Centre for Social Studies and Development- We the People, Nigeria
10. Oilwatch Ghana, Ghana
11. Environmental Justice North Africa (EJNA)
12. Green Concern for Development (GREENCODE), Nigeria
13. Social Action, Nigeria
14. Rainforest Resource and Development Centre (RRDC), Nigeria
15. Lokiaka Community Development Centre, Nigeria
16. Green Alliance of Nigeria (GAN)
17. Struggle to Economize Future Environment (SEFE), Cameroun
18. 350.org, Afrique
19. Gastivists, International
20. Youth Climate Coalition, Royaume Uni
21. Platform London, Royaume uni
22. Observatori del Deute en la Globalització (ODG), Catalunya
23. CoalSwarm, USA
24. Millieudefensie/Friends of the Earth Netherlands
25. Amigos de la Tierra (FoE Espagne)
26. Oil Change International, International
27. Corporate Europe Observatory, Belgique
28. Association Pierre Domachal, France
29. Ecologistas en Acción (Espagne)
30. ATTAC (France)
31. Climáximo (Portugal)
32. Friends of the Earth (USA)
33. Food & Water Europe
34. Friends of the Earth Europe
35. Non au Gazoduc Fos Dunkerque, France
36. Leave it in the Ground Initiative (LINGO)
37. Kebetkache Women Development and Resource Centre, Nigeria
38. Egi Human Rights and Environmental Initiative, Nigeria
39. Ikarama Women Association, Nigeria
40. Oil watch international

Pour tout contact :
1. Nnimmo Bassey, Health of Mother Earth Foundation, Nigeria – nnimmo [at] homef.org +234 803 727 4395
2. attac.maroc [at] gmail.com

Notes

[1Les experts du GIEC estiment que le méthane et de 84 à 87% plus actif que le CO2 dans le réchauffement climatique, en prenant pour base une durée de 20 ans



Articles Par : Collectif

Avis de non-responsabilité : Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que le ou les auteurs. Le Centre de recherche sur la mondialisation se dégage de toute responsabilité concernant le contenu de cet article et ne sera pas tenu responsable pour des erreurs ou informations incorrectes ou inexactes.

Le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) accorde la permission de reproduire la version intégrale ou des extraits d'articles du site Mondialisation.ca sur des sites de médias alternatifs. La source de l'article, l'adresse url ainsi qu'un hyperlien vers l'article original du CRM doivent être indiqués. Une note de droit d'auteur (copyright) doit également être indiquée.

Pour publier des articles de Mondialisation.ca en format papier ou autre, y compris les sites Internet commerciaux, contactez: [email protected]

Mondialisation.ca contient du matériel protégé par le droit d'auteur, dont le détenteur n'a pas toujours autorisé l’utilisation. Nous mettons ce matériel à la disposition de nos lecteurs en vertu du principe "d'utilisation équitable", dans le but d'améliorer la compréhension des enjeux politiques, économiques et sociaux. Tout le matériel mis en ligne sur ce site est à but non lucratif. Il est mis à la disposition de tous ceux qui s'y intéressent dans le but de faire de la recherche ainsi qu'à des fins éducatives. Si vous désirez utiliser du matériel protégé par le droit d'auteur pour des raisons autres que "l'utilisation équitable", vous devez demander la permission au détenteur du droit d'auteur.

Contact média: [email protected]