Algérie : l’identité et sa monstrueuse manipulation.
Lounes Matoub : la foi, la patrie, la fraternité et l’amour.

Dans notre dernière analyse publiée par le Centre de Recherche sur la Mondialisation, il est écrit :
« Dans un silence d’indignité d’autres vedettes qui ont fait de l’identité un fonds d’investissement politicien spéculatif et qu’ils ont épuisé, ils se sont rabattus sur la manipulation des lycéens de la Kabylie alors que l’amazighité est l’unique force sur laquelle peut s’appuyer les patriotes algériens pour sauver la patrie. »
Après la visite du président de la France (Alger, 6/12/2017) et la réunion du Comité intergouvernemental de haut niveau algéro-francais (Paris, 7/12/2017), dès que les premières bribes sur les accords signés commencent à tomber et qui ont donné une indication sur l’ampleur de la soumission de l’Algérie à la France, la Kabylie a été mise en branle pour entre autres laisser les « députés » voter des lois et leur éviter de faire profiter de leurs immunités parlementaires les manifestants de la répression policière et des tentatives d’embrasement.
Dans une gigantesque manipulation sur l’extension de l’enseignement de tamazight (voir note en fin de document), si en Kabylie (Béjaia, Tizi-Ouzou), les manifestations n’ont pas été interdites, ni empêchées ; à Bouira, toujours dans la Kabylie, elles ont été réprimées. En plus l’université de cette ville a été fermée ; à Batna, une région amazighophone de l’Est de l’Algérie, elles ont été empêchées.
Dans une intelligence diabolique, masquer les effets de la visite précitée et en attendant la révélation des décisions de politique monétaire, faire oublier la commémoration du décès de Hocine Ait Ahmed à qui L. Matoub a dédié une de ses œuvres, les différents pouvoirs qui ont pris en otage l’Algérie avec la complicité des élus et des élites ont orchestré cette machine dont ils n’ont aucun contrôle.
Sans l’intervention du Premier-Ministre parti dans le Sud algérien, ni celle du ministre de l’Intérieur parti au Niger, les trois types de manifestations (Béjaia-Tizi Ouzou, Bouira et Batna), avec une agitation autour du barde Lounès Matoub assassiné en 1996, des figures ont été actionnées pour encore jeter de l’huile sur le feu. Pour cela, des studios et plateaux de télévisions leur ont été ouverts et offerts. Le point commun à toutes ces figures connues pour leurs m’as-tu-vu médiatiques : aucune ne s’est exprimée publiquement sur la dotation de l’Algérie d’un hymne national bilingue alors que Lounès Matoub a sur l’air musical de l’actuel hymne national algérien a produit une œuvre qui a fait dire à certains qu’elle est la cause de son assassinat. Elle peut être écoutée dans ce lien (Ici).
En attendant une information plus consistante pour l’analyse des accords et ententes signés et puisque le Centre de Recherche sur la Mondialisation a déjà publié un texte orienté analyses intellectuelle et économique sur cette icône, dans celui-ci, c’est plus le contenu succinct de son œuvre qui sera exposé.
Si Lounes Matoub devait être comparé, il le serait à la canadienne-québécoise Michèle Lalonde ou au chilien Victor Jara.
Œuvre de Lounès Matoub.
Ddaw Uzekka Thighriw (Beyond The Grave, De sous la tombe, mon cri) est l’écho d’une vie, celle qui débute après la dernière présence au cimetière.
Seul un ange ou un démon vit cette expérience de pensée. S’il n’est ni l’un ni l’autre, c’est un démiurge ou thaumaturge. S’il n’est rien de ce qui a précédé, c’est un génie ou savant. Si un tel esprit, n’est absolument rien de tout et absolument rien de ce qui a précédé, versifie et musicalise l’Au-delà, c’est un artiste.
Trop de conditions! Il faut en éliminer quelques-unes pour trouver la réponse, la bonne, pas celle qui plait forcément.
Aldjia Matoub et la dépouille de son fils Lounes. Photo. D.R
Sa biographie scolaire est presque vide, il n’est pas savant. Son QI (Quotient intellectuel) et résultats de tests MBTI (Myers Briggs Type Indicator) sont inconnus, en déduire qu’il est génie serait une aventure. D’après des légendes, les anges et démons s’incarnent dans des corps d’humains.
Est difficile de croire qu’un artiste pourrait rimer et rythmer l’Au-delà. Reste à expurger les déductions invraisemblables et en induire celle qui reste et il ne reste qu’une seule. Elle est double. C’est ce qu’est Lounes Matoub, un né potentiel sous le signe du serpentaire. Pour s’en convaincre, ce lien vers la preuve: https://www.youtube.com/watch?v=_NqRqGlUVbs L’écouter quatre fois est recommandé. La première pour découvrir, la deuxième pour la prose, la troisième pour les sens, la quatrième pour les vibrations.
Lounes Matoub a aussi imploré Cheikh Abderrahmane (El Illouli) qui a son université [1] sur les flancs de la Kabylie. Reste à organiser autour de ce chant un cercle religieux de talibés (talva dans le patois kabyle), imams et enseignants de cette zaouia et leur demander une exégèse, un idjtihad.
Si l’unanimité est absente, traduire ce chant vers l’arabe et autres patois et dialectes amazighes et refaire l’exercice et la lumière jaillira. Oui, la lumière jaillira.
Si un consensus général est obtenu dès la première causerie (halaqa en termes religieux), son exportation aux enfants talibés [2] du Sénégal, pays d’Afrique subsaharienne pour une certaine amazighité partagée est à envisager. De là, ce chant, voyageant au rythme de l’art, rejoindra tout seul Le Caire, El Quds, Médine et La Mecque.
Ddaw Uzekka Thighriw est un chant de Lounes Matoub dédié au parcours du corps de la maison funéraire à la tombe, de l’attente dans le purgatoire et du silence qui y règne du Dohr au Dohr, une prière de la mi-journée, un rituel musulman qui boucle ce temps qui n’existe plus. Dans une minutie à stupéfier, est narrée l’apothéose du cheminement de ces âmes vers Dieu pour recevoir le Jugement dernier, le verdict sur la Destination finale: le Paradis ou l’Enfer. C’est avec ce chant d’amour, que lui l’humain, au moyen de sa foi, d’est adressé à Dieu.
De son vivant, Lounes Matoub
Il a commencé modestement pour être, ensuite, aimé et finir adulé de certains. Il n’a été adopté que sur le tard par d’autres comme l’auteur de ces lignes. Il a été sournoisement vilipendé par ceux, les couchés devant les maitres, à qui il a fait de l’ombre. Comme vengeance pour anéantissement, ils l’ont offert aux médias. Une engeance, les plûmes venimeuses, les algériennes et les étrangères ont fourni la poudre. Naïf, impulsif probablement. Il a été broyé dans le moule des extrémismes franco-algériens et des guerres que ces conditionneurs devaient servir [3].
Il devait être un timide. Il devait manquer de confiance de son influence sur une jeunesse assoiffée de liberté, une génération d’artistes admirateurs de la révolution qu’il a faite dans la musique. Il doutait de son charisme. Ses gestes, son verbe sur les plateaux des télévisions françaises le trahissaient.
A-t-il découvert toutes les manigances qui l’entouraient en affirmant après son gala au Zénith en 1995 en affirmant vouloir redevenir ce qu’il est. En 1998, c’est de ce même Zénith, qu’il a avoué ses peurs et craintes en pleurant [4].
Un autre chant pour la foi et l’amitié
En rappelant que seuls quelques doigts de linceul porteront le cahier de nos actes, il a chanté Lmuth (The Death, El mawt). En seconde partie, dans une voix et un rythme à institutionnaliser, Lounes Matoub proclame sa foi en un Dieu unique et éternel. Les morts, les anges et Dieu en seraient heureux de lui. Les démons, non!
Dans la première partie de cette œuvre, il a chanté le départ d’une amitié réelle vécue aux côtés d’une présence physique pour la remplacer par celle du legs, du souvenir. Il a chanté celle de son ami. Dans cette moitié, toujours ès-qualité, de croyant, il prie le père de son ami de lui indiquer la voie vers cet Au-delà où le repos est Miséricordieux. Toujours, pour évacuer les doutes, ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=NfOqVH0oWn4
Il a chanté la patrie et les patriotes
Il appelle la patrie : El Dzair Aâzizen, Algérie chérie, The Beloved Algeria. Dans un duo avec Nouara; ils le gémissent en musique, en mots et en pleurent dans le timbre de leur voies! Lounes Matoub se demande, nous demande, comment va flotter au vent le drapeau s’il n’est pas respecté par les yeux et comment sera heureux un foyer, le pays, si la famille, le peuple, ne s’entend plus et son ADN est dans ce pont : https://www.youtube.com/watch?v=UZYFpDDeqnU
Avec respect, il a dit aux intellectuels, – vise-t-il les salonnards ou ceux nés avec une cuillère en or dans la bouche ou ceux qui les ont longues et capables de diner avec les diables? – que leur savoir vaut pour rien, eux qui n’ont rien enduré.
Lounes Matoub dit que la lumière est dans l’union de tous les bras, ceux de la force, pérenne; non ceux de la puissance, l’éphémère qui fait disparaitre des corps vivants. Comme la sienne ou comme celles des hommes qui ont pour appartenance lignagère la noblesse. Ces ceux qu’il a mis dans les souffles des flutes des bergers de M’sila et d’ailleurs, dans les gémissements des cordes des violons, pas les violents. Les percussions de cet hymne dans https://www.youtube.com/watch?v=UZYFpDDeqnU sont de la chair de poule sur les peaux lacérées, les peaux brulées.
Lounes Matoub, votre frère, notre frère
Connu comme fils unique, nous lui découvrons un frère, un frère français comme Jean, José et Hervé. Il a voulu que tous les Algériens, des Aurès, jusqu’au fin fond du désert, de l’Oranie et d’ailleurs, soient les siens. Combien ont répondu à cet appel qui demeure lancinant, qui en ces moments mêmes dans la patrie et toute la région devient strident.
Il a chanté l’amour, il en a fait une religion
Il était cruel, violent et pur. Il était pur; il a donné ce que peut attendre une femme d’un homme : de l’amour, des inquiétudes et des scènes certainement. Mais il en a fait des siennes des Diamants comme. Il a dit de l’une d’elles qu’elle est sa lumière.
Il était violent. Il a chanté, il a été jusqu’à promettre la répudiation sous sept jours de sa dulcinée en brisant son foyer. C’est d’une violence morale à exploser tout couple aussi solide soit-il.
Il était cruel. Sa cruauté est venue de l’Au-delà, de là où il savait qu’il irait le premier; il l’avait senti … De l’Au-delà où il a préparé, suprême cynisme, suprême cruauté, le bucher de son épouse.
Il avait chanté toutes ses amours cruelles, violentes et pures. Elles étaient si pures qu’elles étaient devenues violentes, cette intensité ne lui suffisant pas, il les a faites des cruelles.
Ses amours étaient incessibles. Il ne lui restait qu’à leur dire qu’il les em… ou à en faire des monnaies. Il n’a pas franchi ce rubicond.
At Dwaya, ath Dwala! Des balles ont été tirées vers votre camp, dans vos champs. Du sang en a giclé. Répondez par la fraternité et l’amour que votre Villageois a chantés. L’entendez-vous, vous? Ces mots vous disent, dans une voix inaudible, entendre un appel qui dirait: humanité puis humanité et puis humanité.
Cherif Aissat
Post-Scriptum.
Note a. L’auteur n’a jamais rencontré Lwenes Matoub ni de personne réputée proche de sa famille étroite ou élargie.
Note b. Après avoir travaillé sur cet aspect (voir cette conférence : https://www.youtube.com/watch?v=bgA4bIKoPho ) et avoir argumenté dans cette autres vidéo (https://www.youtube.com/watch?v=bfIH_QOJSAk dans les 20 premières minutes), le rédacteur s’oppose radicalement à cette revendication qu’il trouve insensée.
[1]. L’université de Cheikh Abderrahmane El Illouli est située dans la commune d’Illoula Oumalou. (1601-1690). Cette référence est à conformer.
[2] Talibés : appellation en usage dans les milieux académiques internationaux liés à la Coopération. Ils sont l’équivalent de talebs en Algérie. Dans une équipe universitaire, l’auteur a participé dans un travail sur leurs situations au Sénégal.
[3]. Matoub Lounès. Témoignages et pensée. https://www.youtube.com/watch?v=XsuvZPJA0oQ
[4] Lounes Matoub a déclaré : « Je voudrais montrer l’autre côté de ce bonhomme qu’on a médiatisé. Je ne suis pas un politique. » https://www.youtube.com/watch?v=VKLwfvE0xYU